Stéphane Carrade, chef deux-étoiles au Skiff Club sur le Bassin d’Arcachon

Stéphane Carrade au Choka Bleu où il a réalisé deux diners à quatre mains avec le chef Virassamy-Macé @TK

C’est parce qu’il avait des fourmis dans les mains et un horizon bouché en raison des fermetures des restaurants en métropole, que le chef Stéphane Carrade a décidé de venir à La Réunion durant les fêtes de cette année si particulière. Une île qu’il connaît très bien et avec laquelle il partage une histoire d’amour depuis plus de trente ans ; il y puise une partie de sa créativité dans les plats qu’il réalise désormais au Skiff Club sur le Bassin d’Arcachon. La Réunion, il l’a découverte en effectuant son service militaire au RSMA de Saint-Pierre. Un séjour qui l’aura marqué professionnellement et sentimentalement, et il ne regrette aucunement d’avoir dû quitter l’hôtel Hilton à Londres dans lequel il avait débuté sa carrière après l’obtention de son CAP-BEP à Talence près de Bordeaux.

Carpaccio de thon,, huître grillée, king crabe, coussinet de pâtes © GP

Sa cuisine qu’il qualifie aujourd’hui de « terroir progressif » vient, aussi étonnant soit-il, du maloya qui dans les années 1990 observait un élan de modernisme en incluant de l’électrique dans cette musique traditionnelle. Stéphane Carrade veut que sa cuisine évolue en permanence, davantage aujourd’hui ; il est hors de question qu’un plat reste à la carte plus d’une saison. Après son service militaire, il reviendra sur l’île travailler durant un an au restaurant Les Flamboyants à Saint-Pierre (aujourd’hui Maison Blanche, rue du Four à Chaux) aux côtés d’un patron savoyard qui composait entre cuisine créole et métro tout en proposant des fondues aux fromages, un vaste programme… Mais une période suffisamment longue qui permettra au chef de faire plus ample connaissance avec les épices locales et le terroir de l’île, et qui s’imprimera à jamais dans l’ADN de sa cuisine.

Seiche et mousse de dormeur, berniques aux févettes, croque de sel © GP

Arrivé au Skiff Club du côté d’Arcachon en juillet 2016, le chef Carrade a réussi un tour de force en obtenant en moins de quatre ans, 2 étoiles au Guide Michelin après avoir décroché la première étoile quelques mois seulement après l’ouverture de ce restaurant de l’hôtel Haiitza. Les étoiles, ce chef, jeune quinquagénaire natif de Tarbes, y avait déjà goûtées dans les différents établissements dans lesquels il a construit sa carrière. Les Relais & Châteaux, très souvent étoilés, ont jalonné son parcours : du Château Saint-Martin en Côte d’Azur, La Ferme Saint-Siméon à Honfleur puis l’établissement de Roger Souvereyns, 2* Michelin, à Hasselt en Belgique, avec ensuite en Ardèche, La Cardinale à Baix aux côtés du chef Éric Sapet, et, en 1995, l’établissement du chef Jean Bardet, Le Château Belmont, 2 étoiles Michelin à Tours, qui sera le mentor du chef Carrade. En 1998, il souhaite retrouver ses origines et s’associe pour le rachat d’un bel établissement à Jurançon, Chez Ruffet. Il y obtiendra 2 étoiles au Guide Michelin en 2006 avant que l’adresse ne perde de sa superbe et décline en raison d’une mauvaise association. Le chef Carrade rebondit en devenant directeur d’un hôtel-restaurant, La Guérinière sur le Bassin d’Arcachon, où il sera directeur-chef durant 4 ans. C’est ensuite le Grand Hôtel de Bordeaux, bien heureux de trouver un chef originaire du Sud-Ouest, qui lui confie les cuisines de la brasserie tout en préparant l’arrivée du médiatique chef Gordon Ramsay pour le restaurant gastronomique. Puis il écrira cette belle page qu’il continue de peaufiner au Skiff Club avec ses deux étoiles Michelin ! La Réunion fait partie de son répertoire gastronomique ; il utilise souvent dans ses plats des ingrédients de l’île : vanille, massalé, lentilles de Cilaos ; et il n’hésite pas à demander aux maraîchers du Bassin de lui faire pousser des chouchoux comme des brèdes. Cette pause imposée par le confinement et l’éloignement, lui permet également d’élaborer de nouveaux plats comme cette dernière inspiration née à proximité du lagon : un blinis à la farine de sarrazin, avec une crème de tamarin, des lentilles de Cilaos et du caviar d’Aquitaine, un mets qui traduit à la fois ses origines et ses influences réunionnaises.

Pigeon laqué au vieux rhum @GP