Florent Martin, premier sommelier du Four Seasons George V à La Réunion
Avec ses tenues élégantes et colorées, qui ne sont pas sans rappeler celles d’Éric Beaumard, son mentor et directeur du restaurant 3-étoiles Michelin, Le 5 au Four Seasons George V à Paris, le sommelier Florent Martin était à La Réunion pour l’inauguration de la cave à vins de l’hôtel 5*, Le Diana Dea Lodge sur les hauteurs de Sainte-Anne dans l’Est de l’île.
Si pour Florent Martin, c’était une première à La Réunion ; celui-ci connaît bien l’insularité car ce jeune trentenaire est originaire de Corse, plus précisément d’Ajaccio. À 18 ans, il quitte l’Île de Beauté pour rejoindre une autre île, plus grande, La Grande Bretagne à Londres, où il travaillera quelques années dans les caves du chef cathodique Gordon Ramsay où il deviendra bilingue en parlant vin. Puis ce sera le Louis XV chez Alain Ducasse à Monaco avant d’intégrer il y a déjà dix ans, le grand palace parisien le Four Seasons George V où Éric Beaumard, chef sommelier à l’époque, le passionnera davantage au métier en dégustant grands vins et vins en devenir tout en rencontrant de nombreux vignerons de l’Hexagone et du monde entier, comme le péché mignon de Beaumard : les portos…
Florent Martin fait partie des 3 finalistes retenus pour la finale du Meilleur Sommelier de France qui aura lieu, le 1er février. Ce sera sa quatrième participation à la finale de ce concours, autant que pour les finales du Meilleur Ouvrier de France. Un travail et une constance qui finiront un jour par payer… rien n’est vin…
Espérons que son passage express à La Réunion où il a pu renouer avec le plaisir du service dont il est privé depuis quelques mois en métropole, puisse lui porter chance.
Avant le wine diner inaugural du Diana Dea Lodge, Florent Martin a réalisé une dégustation en public de deux vins qu’il avait choisis dans la nouvelle cave de l’hôtel : un sapide et salin sauvignon sud-africain 2017 de Stellenbosch du Domaine Ken Forrester, et un épicé et séduisant gewürztraminer sec Les Fous 2017 du bon et biodynamique domaine alsacien Léon Boesch.
Florent Martin a signé les accords mets et vins de ce grand dîner créolonomique exclusivement avec les vins de la carte des vins de l’hôtel. Il a travaillé en concertation avec le chef Jofrane Dailly du Diana Dea Lodge.
À table, en « préambulles », la cuvée Triple Zéro de Jacky Blot du Domaine de La Taille aux Loups a apporté beaucoup de fraîcheur et de vivacité sur la perle d’huître Marennes et caviar Rova de Madagascar et le foie gras de Canard de Saint Joseph enrobé de sa fine gelée de vin de Cilaos. Triple Zéro est une célèbre cuvée effervescente de montlouis-sur-loire réalisée à base de chenin. Pourquoi Triple Zéro ? Zéro chaptalisation, Zéro liqueur de tirage, Zéro liqueur d’expédition : un extra-brut naturel !
Sur le chou coco à la vanille bleue, médaillon de langouste, voile d’eau de coco, c’est un très bon viognier, Taburnum 2017 des Vins de Vienne qui était proposé. Un blanc aromatique avec une belle matière, ronde, légèrement grasse, sur des arômes de pêche, d’abricot, et légèrement violette. La feuille d’huître qui a été ajoutée à la dernière minute à cette entrée, est venue déséquilibrer l’accord par le côté iodé du végétal qui s’est heurté aux notes de fruits blancs du vin. Cette IGP des Collines Rhodaniennes est élaborée avec talent par Les Vins de Vienne qui ne sont autres que trois grands vignerons de la vallée du Rhône, à savoir : Yves Cuilleron, Pierre Gaillard et François Villard.
Un sommelier doit casser les codes et proposer des surprises, c’est ce que pratique au quotidien, quand il n’est pas privé de son métier, Florent Martin. Avec cet accord de vin rouge sur le poisson, en l’occurrence un filet de lapia (gueule rouge) du Piton Armand, et des carottes du potager du Diana Dea Lodge, Florent Martin a surpris plus d’un convive à table. Mais quel vin, ce vin rouge ! Un gamay du beaujolais, du pur fruit de Morgon avec ce Lapierre 2018. Le gamay est un cépage qui, pour moi s’accorde avec de nombreuses choses à table, une sorte de passe-partout d’accords mets et vins : poissons, viandes, légumes, desserts fruits rouges et noirs, chocolat… Ce morgon est signé par la famille Lapierre qui a pris la suite de Marcel, aujourd’hui décédé, et qui poursuit le travail de ce pionnier des vins nature en France, il y a plus de quarante ans. Des vins nature complètement stabilisés…
Le plat suivant était un superbe mets autour du pigeonneau de la famille Roche des Avirons, avec une cuisse confite en croquette, et un suprême fondant, relevé d’un délicieux jus au café Bourbon Pointu de Madame Vidot qui a apporté une belle touche d’amertume à l’ensemble. Pour matcher avec la viande rouge, Florent Martin avait choisi un puissant et fin Nuits-Saint-Georges 2017 du Domaine Lécheneaut. Ce pinot noir de Bourgogne, encore jeune, affirmait déjà de la finesse et de l’élégance en bouche avec une matière structurée et solide.
L’assiette de fromages, composée d’ossau-iraty, d’appenzeller et de filletta de Corse, a permis au sommelier du George V de proposer un nouvel accord insolite (de plus en plus courant pour les initiés et surtout, plus logique) : un vin blanc avec les fromages. Un Puligny-Montrachet 2018 du Domaine Bachelet-Monnot. Grande classe pour ce chardonnay de Bourgogne, d’une très grande finesse et précision, avec des notes végétales, minérales et d’une grande longueur. Un vin qui reflète parfaitement le terroir de Puligny et réalisé par un très bon domaine.
Le dessert de la soirée était signé Jordan Gasco, chef-pâtissier du restaurant 2-étoiles, Le Chambard à Kaysersberg en Alsace, sous les ailes du chef Meilleur Ouvrier de France, Olivier Nasti. Jordan a travaillé il y a trois ans aux côtés du chef Jofrane Dailly au Saint-Michel à Saint-Gilles-les-Bains. Le pâtissier a réalisé un superbe dessert à base de chocolat bio noir et lacté Andoa de Valrhona, en différentes textures. L’accord de Florent Martin s’est porté sur un très bon maury hors d’âge à base de vieux grenache noir du Domaine Pouderoux dans le Roussillon. Un très bel accord qui a mis en avant l’équilibre sucre/acidité/sel/amer du chocolat du dessert avec les notes chocolatées, de pruneau, de fruits secs de ce maury, pas trop sucré. Le maury est un vin doux naturel, dit muté, dont la fermentation est stoppée par l’adjonction d’un alcool vinique.
Julien Richoux, de la graine de champion…
Julien Richoux n’était pas revenu à La Réunion depuis deux ans. Le contexte du Covid et l’arrêt de l’activité des restaurants en métropole lui ont permis de renouer avec ses racines et de recharger les batteries auprès des siens. Une façon aussi de se reconnecter avec le terroir local comme pêcher la truite sauvage à Roche-Plate du côté de la Rivières des Remparts… et réaliser de belles assiettes comme ce tartare, avec tempura de brèdes chouchou et billes de pamplemousse.
Même en vacances, il ne boude pas son plaisir à cuisiner, surtout pour ses parents aux Avirons, et de retrouver les fumets de la cuisine traditionnelle réunionnaise qu’il aime tant. C’est d’ailleurs en réalisant en septembre une pièce fabuleuse, gastronomique et technique, en hommage à La Réunion, qu’il a pu intégrer l’Union Compagnonnique des Compagnons du Tour de France des Devoirs Unis. Une pièce qu’il a accompagnée d’un dossier documenté qui racontait l’histoire de chacun des éléments de son plat : le pigeon (un clin d’œil aux Avirons), l’oignon Châteauvieux, le zembrokal, le rougail tomate… Une prouesse davantage a salué pour ce jeune cuisinier atteint de troubles « dys », une revanche pour ce collégien aux résultats peu encourageants, assisté d’une AVS (Auxiliaire de Vie Scolaire) durant ses années de cours à L’ Étang-Salé.
L’arrivée au lycée hôtelier de La Renaissance à Plateau Caillou a été pour lui le déclic. La pratique de la cuisine, l’internat, la rencontre avec certains professeurs comme Messieurs Lamy et Bayard, lui ont donné beaucoup de confiance et les résultats scolaires sont devenus tout d’un coup brillants, excellents. Durant son BEP et Bac Professionnel, il sera en stage dans de beaux établissements à La Réunion comme La Case Pitey et le Blue Margouillat ainsi qu’à la fromagerie Au Bon Fromage d’Étang-Salé quand cette dernière lança son offre de restauration. Lauréat du concours du Meilleur Espoir de l’Océan Indien, Julien Richoux part faire un stage dans les cuisines de l’Élysée sous la présidence de François Hollande et sous les ordres du chef Guillaume Gomez. Il y préparera un concours, celui du Grand Cordon d’Or de la Cuisine Française à Monaco, qui lui permettra, à 16/17 ans de découvrir l’univers de la compétition culinaire.
Après La Réunion, il intègre un BTS à la réputée École Ferrandi à Paris où il alterne deux mois de cours et deux mois de pratique au Mandarin Oriental chez le chef Thierry Marx où il deviendra employé après l’obtention de son diplôme. Évoluant à différents postes et dans les différents restaurants du palace de la rue Saint-Honoré, Julien officie au restaurant principal du Mandarin, Le Camélia. Il y côtoiera Mory Sako, l’une des révélations de la dernière saison de Top Chef, parti aujourd’hui vers des aventures personnelles.
À 22 ans, Julien Richoux, la tête bien sur les épaules, ambitionne de multiplier les expériences chez les grands cuisiniers. Décomplexé à present de ses troubles dys, il construit méthodiquement sa carrière et vise grand et haut. Et pourquoi pas ouvrir un jour une table dans le hameau des Hautes-Pyrénées où son père, horticulteur renommé à La Réunion, a planté de nombreuses variétés d’arbres fruitiers rares et de légumes anciens…
Julien Richoux est né en 1998, une année de champions du monde qui pourrait peut-être bien lui porter chance pour la suite de sa vie…
Stéphane Carrade, chef deux-étoiles au Skiff Club sur le Bassin d’Arcachon
C’est parce qu’il avait des fourmis dans les mains et un horizon bouché en raison des fermetures des restaurants en métropole, que le chef Stéphane Carrade a décidé de venir à La Réunion durant les fêtes de cette année si particulière. Une île qu’il connaît très bien et avec laquelle il partage une histoire d’amour depuis plus de trente ans ; il y puise une partie de sa créativité dans les plats qu’il réalise désormais au Skiff Club sur le Bassin d’Arcachon. La Réunion, il l’a découverte en effectuant son service militaire au RSMA de Saint-Pierre. Un séjour qui l’aura marqué professionnellement et sentimentalement, et il ne regrette aucunement d’avoir dû quitter l’hôtel Hilton à Londres dans lequel il avait débuté sa carrière après l’obtention de son CAP-BEP à Talence près de Bordeaux.
Sa cuisine qu’il qualifie aujourd’hui de « terroir progressif » vient, aussi étonnant soit-il, du maloya qui dans les années 1990 observait un élan de modernisme en incluant de l’électrique dans cette musique traditionnelle. Stéphane Carrade veut que sa cuisine évolue en permanence, davantage aujourd’hui ; il est hors de question qu’un plat reste à la carte plus d’une saison. Après son service militaire, il reviendra sur l’île travailler durant un an au restaurant Les Flamboyants à Saint-Pierre (aujourd’hui Maison Blanche, rue du Four à Chaux) aux côtés d’un patron savoyard qui composait entre cuisine créole et métro tout en proposant des fondues aux fromages, un vaste programme… Mais une période suffisamment longue qui permettra au chef de faire plus ample connaissance avec les épices locales et le terroir de l’île, et qui s’imprimera à jamais dans l’ADN de sa cuisine.
Arrivé au Skiff Club du côté d’Arcachon en juillet 2016, le chef Carrade a réussi un tour de force en obtenant en moins de quatre ans, 2 étoiles au Guide Michelin après avoir décroché la première étoile quelques mois seulement après l’ouverture de ce restaurant de l’hôtel Haiitza. Les étoiles, ce chef, jeune quinquagénaire natif de Tarbes, y avait déjà goûtées dans les différents établissements dans lesquels il a construit sa carrière. Les Relais & Châteaux, très souvent étoilés, ont jalonné son parcours : du Château Saint-Martin en Côte d’Azur, La Ferme Saint-Siméon à Honfleur puis l’établissement de Roger Souvereyns, 2* Michelin, à Hasselt en Belgique, avec ensuite en Ardèche, La Cardinale à Baix aux côtés du chef Éric Sapet, et, en 1995, l’établissement du chef Jean Bardet, Le Château Belmont, 2 étoiles Michelin à Tours, qui sera le mentor du chef Carrade. En 1998, il souhaite retrouver ses origines et s’associe pour le rachat d’un bel établissement à Jurançon, Chez Ruffet. Il y obtiendra 2 étoiles au Guide Michelin en 2006 avant que l’adresse ne perde de sa superbe et décline en raison d’une mauvaise association. Le chef Carrade rebondit en devenant directeur d’un hôtel-restaurant, La Guérinière sur le Bassin d’Arcachon, où il sera directeur-chef durant 4 ans. C’est ensuite le Grand Hôtel de Bordeaux, bien heureux de trouver un chef originaire du Sud-Ouest, qui lui confie les cuisines de la brasserie tout en préparant l’arrivée du médiatique chef Gordon Ramsay pour le restaurant gastronomique. Puis il écrira cette belle page qu’il continue de peaufiner au Skiff Club avec ses deux étoiles Michelin ! La Réunion fait partie de son répertoire gastronomique ; il utilise souvent dans ses plats des ingrédients de l’île : vanille, massalé, lentilles de Cilaos ; et il n’hésite pas à demander aux maraîchers du Bassin de lui faire pousser des chouchoux comme des brèdes. Cette pause imposée par le confinement et l’éloignement, lui permet également d’élaborer de nouveaux plats comme cette dernière inspiration née à proximité du lagon : un blinis à la farine de sarrazin, avec une crème de tamarin, des lentilles de Cilaos et du caviar d’Aquitaine, un mets qui traduit à la fois ses origines et ses influences réunionnaises.
LA GASTRONOMIE PAYS CONTRE LE CORONAVIRUS #27 : le sommelier réunionnais Réza Nahaboo représentera la Suisse lors du concours du meilleur sommelier d’Europe à Chypre
Le confinement permet de faire des rencontres, virtuelles soient-elles. C’est ainsi, grâce à l’ami Jean Bernard, que j’ai pu faire tout récemment la connaissance de Réza Nahaboo, millésime 1987, chef sommelier en Suisse. Ce brillant Réunionnais, au parcours déjà bien étoffé, nous raconte son ascension professionnelle et n’oublie pas l’île qui l’a vu naître. Quand l’excellence réunionnaise s’exporte…
Tout d’abord, comment vivez-vous ce confinement ?
Le confinement se passe très bien. J’ai la chance d’avoir un balcon et de l’espace. Je pense à tous ceux qui vivent dans des appartements restreints, peu lumineux, à plusieurs, ce n’est pas la même chose… Aussi, ici en Suisse, le confinement est beaucoup moins strict que dans tous les autres pays voisins. Nous avons la liberté de sortir quand nous le souhaitons tant que l’on respecte les consignes de sécurité. Pour ma part, je vais en montagne m’aérer et être sûr de ne pas avoir de contacts…
Pouvez-vous en quelques lignes nous décrire votre parcours professionnel ?
J’ai commencé la restauration en apprentissage à l’âge de 15 ans dans la région Iséroise en France. J’ai obtenu un CAP Restaurant, puis un Brevet Professionnel Restaurant et une mention Sommellerie (5 ans d’alternance au total). Puis, à 19 ans, avec la mention en poche, je suis venu en Suisse à Montreux. J’ai travaillé pour une maison étoilée et une année plus tard, j’ai eu l’honneur de travailler pour Monsieur Rochat à Crissier, dans un établissement triplement étoilé où je fus assistant chef sommelier. Par la suite, j’ai multiplié mes expériences helvétiques comme à Genève au Four Seasons ou dans le Valais en travaillant pour des chefs étoilés. En termes de diversité, j’ai travaillé dans des établissements modestes, des maisons type brasserie, un wine bar, un shop de vins en lignes et la restauration étoilée en qualité, soit de chef sommelier soit de maître d’hôtel. En 2015, j’ai eu le privilège de faire l’ouverture du 5-étoiles Hôtel Royal Savoy de Lausanne. Ce fut une expérience incroyable où j’étais chef sommelier et assistant manager. J’ai eu l’honneur de créer une carte des vins de 420 références pour le restaurant de Monsieur et chef Marc Haeberlin… Puis en 2017, une autre ouverture et un nouveau poste : Sommelier Instructor pour le nouveau restaurant Le Bellevue situé dans la prestigieuse école Glion Institute of Higher Education où officient trois Meilleurs Ouvriers de France et Monsieur Paolo Basso, Meilleur Sommelier du Monde 2013.
Comment est venue chez vous la passion de la sommellerie ?
Lorsque j’ai commencé l’apprentissage, j’ai eu un feeling avec la partie boissons car j’avais la responsabilité de service des apéritifs et des vins, ça m’intéressait beaucoup. Puis, plus tard, j’ai rencontré un vrai sommelier de métier. Et je trouvais le personnage captivant, humble et étrange car il parlait de choses que je ne comprenais pas, mais les clients étaient fascinés. Puis un jour, il m’a donné un verre de crozes-hermitage à goûter, et ce fut le déclic…
Est-ce plus compliqué pour un Réunionnais, dont la culture est davantage tournée vers le rhum, de percer dans la sommellerie internationale ?
Je dois avouer que chercher une place d’apprentissage avec mon nom de famille ne fut pas très facile et j’ai eu une ou deux surprises liées à l’intégration. Personnellement, je ne pense pas que c’est une question de cultures ou de talents mais juste du travail. Si on a la fibre, la passion et que l’on travaille dur alors on y arrive ! Labor Omnia Probit Improbus ! (Un travail acharné vient à bout de tout).
Toutefois et sans fausse modestie, je ne me considère pas comme avoir « percé » dans la sommellerie internationale. Je reste à ma place, je suis un étudiant du vin, un apprenti. Et tant mieux si j’arrive à transmettre des choses positives liées à ma passion.
Quels sont vos titres en sommellerie et vos participations aux concours ?
Je fus : Meilleur élève sommelier de France Vins du Val de Loire en 2007 ; 3e Meilleur Sommelier de Suisse en 2009 et en 2012 ; 2e Meilleur Sommelier de Suisse en 2014 et Meilleur Sommelier de Suisse en 2016. J’ai récemment réussi l’examen Advanced du Master Sommelier et la sélection nationale pour représenter la Suisse aux prochains championnats d’Europe de sommellerie à Chypre.
Vous êtes toujours attaché à La Réunion ? Vous êtes originaire de quelle ville ?
Je suis né à Sainte Clotilde et je me sens toujours attaché à La Réunion. C’est une île incroyable avec une telle richesse et une telle diversité. Je suis très fier de mes racines, aussi, ma mère est de La Réunion, et mon père et mes frères sont de l’île Maurice.
Revenez-vous de temps à autre sur l’île ?
J’y suis retourné l’année dernière mais j’avoue que je n’y étais pas revenu depuis plus de dix ans… Non pas que je n’en avais pas envie !
La cuisine réunionnaise vous manque-t-elle ?
J’ai la chance que ma mère soit une grande cuisinière et que lorsque je la retrouve, elle me concocte des rougails, carrys, samoussas, sarcives pour les fêtes et même des bouchons. Alors à part le boucané et le ti jaque. Ça va… ce qui me manque c’est la saveur des fruits sur place lorsqu’ils sont à pleine maturité… un longani ou un letchi très mûr c’est quelque chose !
Quels sont les plus beaux accords qu’on pourrait réaliser avec les grands standards de la cuisine traditionnelle réunionnaise ?
Je dois être honnête mais c’est un sujet que j’aimerais travailler assez sérieusement pour aller plus en profondeur dans l’accord créole. Je n’ai pas vraiment eu l’opportunité de tester les accords avec différents styles de vins mais c’est dans ma tête.
Le problème, à mon sens, c’est le piment. Qu’il soit en pâte, en vinaigrette, frais, piments oiseau, ou cabri… tout ce que vous voulez. À mon avis, le piment (surtout avec les doses réunionnaises !) ne laisse pas la place au vin… par la capacité à brûler et piquer en persistance.
Mais en l’absence de piment sur les rougails/carrys, il y a des choses à faire. Les cuissons type carrys avec la tomate, ont énormément de succulence, de la persistance et les épices infusées sont souvent équilibrées, je pense que des cépages espagnols comme le mencia sur Bierzo ou Ribeira Sacra peuvent être sublimes sur des rougails thon. Avec le rougail saucisses, je garderais le même esprit mais avec des notes plus fumées et des terroirs volcaniques comme les vins de l’Etna à base de nerello mascalese avec un peu d’évolution sinon les tanins sont trop secs…
Pour le gratin chouchou, on pourrait imaginer un vin frais, variétal et avec de bons amers comme un grüner veltliner d’Autriche. Peut-être un style plus crémeux comme un Ried (cru) ou une Réserve apportera la structure pour gagner en volume.
Vous représenterez la Suisse aux prochains championnats d’Europe de la sommellerie. Comment avez-vous vécu cette nouvelle ? Comment vous préparez-vous pour cette compétition en ces temps confinés ? Vous fixez-vous un objectif pour ce concours ?
Quand j’ai appris cette nouvelle, je n’en revenais pas ! Car il y avait certaines épreuves notamment sur la dégustation, qui m’ont un peu décontenancé. Ensuite, le questionnaire était très dur pour moi. Alors je ne faisais pas le malin. Comment je me prépare ? Sincèrement, je n’ai pas encore commencé. Je sais que c’est honteux au vu du challenge mais avec mon travail on a dû réadapter toute notre méthodologie avec les contenus et les cours en ligne et du coup, je dois déjà être prêt sur cette partie pour me reconcentrer au plus vite sur le concours.
Pour la préparation, je vais étudier sur plusieurs points les pays viticoles du monde. Déguster des vins du monde régulièrement. Je suis entouré de mon collègue Fabien Mène qui est un des meilleurs sommeliers de Suisse, de Davide Dargenio, meilleur sommelier d’Italie, et de Bertrand Lutaud qui est un vrai coach pour moi et qui se prépare pour le Master Sommelier.
Mon objectif est bien sûr secrètement la finale comme tous les candidats mais c’est certainement utopique… Je suis déjà très heureux de pouvoir faire ce grand concours et si j’atteins les demi-finales alors ça serait déjà merveilleux…
Quels styles de vins aimez-vous ?
J’aime tous styles de vins, j’aime le pinot noir sous toutes ses coutures, le riesling, le chenin !
J’aime les cépages autochtones. Les vins fins où le terroir est le protagoniste.
Votre plus grande émotion en dégustation ?
La Tâche 1998 du Domaine de La Romanée-Conti… pluridimensionnel !
Le vin que vous rêveriez de goûter ?
Il y en a plein, des vins historiques, des vieux millésimes de Rayas, des rieslings de Moselle allemande d’avant-guerre pour voir l’évolution, des vieux monfortinos sur Barolo….
Un message à passer aux Réunionnais durant ce confinement ?
J’espère que les jeunes cuisinent avec leurs parents ! Pour que la culture ne s’efface pas mais se transmette… Et vive La Réunion ! Vive le rhum arrangé !
La Fontaine Aromatique, l’huile de La Réunion !
Le chemin Surprise de Saint-Leu aux virages serrés vous mènera dans un havre de paix sympathique et charmant tenu par Johan Morel. Ce jeune homme, passionné de nature, est revenu sur les terres de ses origines pour relancer une activité jadis florissante tombée quelque peu dans l’oubli. Johan s’est lancé, il y a quelque six mois, dans la production artisanale d’huiles essentielles 100 % locales. Pour cela, il a retapé de ses mains avec l’aide d’un ami ferblantier et d’un tailleur de pierre, un alambic “lontan” où le temps a fait son oeuvre sur un cuivre devenu vert de gris. Niaouli, citronelle, géranium, camphre, tea tree, eucalyptus sont quelques-unes des plantes qu’il cultive alentour ou qu’il va lui même récolté dans les jardins de particuliers afin de les préparer à la distillation.
Chaque vendredi matin, c’est le rituel de la “cuite” à La Fontaine Aromatique, un moment qu’il aime partager car il accueille les touristes et les visiteurs curieux de cette pratique ancestrale et adeptes d’huiles essentielles. Il chauffe son alambic au feu de bois et laisse ensuite la distillation s’effectuer ; à titre informatif, quelque 200 kilos de feuilles de niaouli donneront, après 3 heures de chauffe, à peine 40 cl d’huile essentielle et une cinquantaine de litres d’hydrolats.
Durant tous ces échanges avec les visiteurs, Johan partage tous les bienfaits de ses huiles essentielles et se fait un point d’honneur de ne proposer que des huiles essentielles locales et qu’il a distillées lui-même. Le néo-distillateur fourmille d’idées pour développer son activité en créant des distillations originales comme lors des pleines lunes, et serait ravi de collaborer avec des chefs cuisiniers et des métiers de bouche qui sublimeraient ses produits issus du terroir réunionnais. L’une de ses dernières créations : l’huile essentielle de 4-épices…
Pour plus d’informations : https://www.lafontainearomatique.re/ et au 06 92 07 50 45
Glenn Viel, le nouveau et plus jeune chef 3-étoiles au Guide Michelin France à La Réunion !
Son nom ne vous dit presque rien ! Il faudra pourtant compter sur le discret et solide chef Glenn Viel pour les prochaines décennies dans la cuisine française. Il vient d’obtenir sa troisième étoile Michelin qu’il a réhabilitée dans cette institution de Provence, L’Oustau de Baumanière du tutélaire Monsieur Jean-André Charial qui voulait retrouver le triptyque stellaire avant la fin de son service. C’est donc chose faite grâce à cet hyperactif chef âgé de 40 ans, le plus jeune des 29 chefs que comptent les 3-étoiles Michelin France. Dans quelques jours, le restaurant rouvrira ses portes pour ses premiers services 3-étoiles ! Vous le verrez aussi la semaine prochaine dans Top Chef et bientôt dans 7 à 8 !
Son voyage à La Réunion pour revoir sa belle-famille était fixé de longue date, programmé durant les deux mois de pause de l’année du restaurant provençal. Trois jours seulement après la cérémonie des étoiles Michelin 2020. “J’ai appris l’obtention de ma troisième étoile dans le public comme tout le monde. Je suis monté sur scène, c’était énorme. Cela ne fait pas cinq ans, date à laquelle je suis arrivé chez Monsieur Charial, que je travaille pour ça mais depuis 20 ans, depuis mes débuts !” glisse-t-il avec émotion.
En effet, ce Breton d’origine, né à Versailles, qui a suivi son père gendarme dans ses mutations professionnelles, et notamment à La Réunion, a déjà de belles expériences derrière lui aux côtés de chefs comme Yannick Alléno ou Nicolas Sales où il échafaudera les étoiles une à une en travaillant également à Marseille, en Corse mais aussi à Bora Bora ou encore en Russie. Le chef Glenn Viel n’est pas du genre à reproduire ailleurs ce qui a fait le succès d’une adresse. “En changeant d’établissement, je reprends tout à zéro. J’apprivoise le terroir local. Il n’y a quasiment aucun plat que je fais depuis mon passage dans les étoilés, ah si, peut-être le “tourteau bœuf”. Fait nouveau, il conçoit un plat en y mettant de la psychologie comme ingrédient : “faire travailler les sens dans le bon sens pour que les goûts ne soient pas dilués dans des dressages sophistiqués et incohérents, aller à l’essentiel, épurer. Chaque élément dans l’assiette doit avoir un sens”. Tout comme la température de service des plats ; chez lui, tout est servi à 47 °C pour ne pas que la chaleur l’emporte sur le goût du plat. S’il garde la tête froide de ce nouveau statut trois-étoiles, Glenn Viel est en constante ébullition, des idées d’innovation fusent de partout, en restant juste, à l’instar de ses “cailloux d’assaisonnement” qu’il a créés à base de céleris, langoustines, champignons déshydratés. Le chef-artisan en a encore sous le pied pour décrocher sa quatrième étoile, celle qui n’existe que pour lui et pour ses clients.
Glenn Viel offre une démarche globale dans sa cuisine. Il a mis en place toute une chaîne d’artisans locaux autour de lui : du meunier pour ses accords mets-pains, à la poterie pour ses assiettes en passant par un souffleur de verres pour sa verrerie, un potager pour les légumes sans oublier des poules et des cochons pour les restes.
“Je n’étais plus revenu à La Réunion depuis 8 ans. Cela fait 5 ans que je n’avais pas pris de vacances.” La Réunion, c’est pour lui des souvenirs quand son papa était en poste sur l’île et celui de la rencontre de son épouse. Celui qui trouve qu’on mange de manière générale mieux sur l’île qu’en métropole, apprécie d’acheter des barquettes de cuisine traditionnelle réunionnaise ici et là. Côté tables gastronomiques, il a trouvé une réelle montée en gamme depuis son dernier voyage. Le chef Glenn Viel a testé le Makassar du Palm Hôtel à Grande-Anse et Le Blue Margouillat à Saint-Leu, et pense que ces adresses pourraient figurer dans le guide rouge. Son péché mignon sur l’île ? Glenn Viel voue un amour inconditionnel à l’ananas Victoria et aimerait tant en trouver de cette fraîcheur dans les Baux-de-Provence. Qui sait ? C’est peut-être pour bientôt…
Goyaviers
Qui dit 1er mai dit…muguet et goyavier…la rime est facile ! 🙂
Du côté de la chatoyante Plaine des Palmistes à La Réunion, avec ses platanes au feuillage jaunissant, le Verger Delatre, dirigé de main de maître par Mickael Delatre, accueille actuellement 7 jours sur 7 de 8h à 16h en continu ! Vous voguez ensuite dans une nature où les délicieuses baies rouges acidulées vous font de l’œil pour devenir vos jus, vos coulis, vos confitures, vos gelées…On n’y résiste pas !
Verger très bien entretenu où il est également possible de cueillir vos goyaviers sur un terrain plat, pratique et confortable avec des poussettes, des chaises roulantes, des jeunes enfants et personnes âgées !
Ne soyez pas sots, optez pour remplir le seau de 5 litres à 5 euros ou le seau de 10 litres à 10 euros ! La cueillette est facile et rapide tellement les goyaviers abondent en ce moment ! Vous pouvez joindre le brin goyavier Mickael au 06 92 56 39 50 !Kapp Chocolatier
Kapp ou pas cap ?
En tout cas, Damien Kapp l’a fait en ouvrant discrètement au Tampon il y a moins de six mois, Kapp Chocolatier. Cet artisan fondu de chocolat, formé et adoubé par des monuments du métier comme Patrick Roger ou Pierre Hermé, élabore dans son labo de production quelques petites merveilles chocolatées…
À base de couvertures Valrhona de différentes origines et principalement des matières premières bio, les créations de Damien Kapp séduisent par leur finesse de bouche, leur équilibre, leur gourmandise raisonnée… qui plus est sans conservateurs ni arômes artificiels ! Les addicts au chocolat peuvent sortir leurs ordonnances 🙂 Les créations de Pâques, à tous les prix, sont sobres, élégamment mis en valeur dans du packaging transparent. Retenez bien son nom, Damien Kapp devrait devenir une sérieuse référence des amateurs de chocolat de La Réunion ! Alors Pâques ou Kapp ? Les deux assurément 🙂
Ses chocolats sont en vente dans sa coquette boutique attenante à sa chocolaterie du Tampon.